Les ressources

Masters de Psychologie :
Nous avons du boulot !

A l’initiative de Franck Ramus et de membres de l’APSU, une équipe de bénévoles de notre association a examiné les maquettes des masters en Psychologie pour voir quelles étaient les approches les plus représentées dans ses différentes sous-disciplines.

Le résultat est édifiant : les approches basées sur les preuves sont toujours minoritaires, comme le montrent les résultats que Franck Ramus a détaillé sur son blog : http://www.scilogs.fr/ramus-meninges/psychanalyse-universite-2020-masters/.
Par exemple, le graphique ci-dessous nous montre qu’en psychologie clinique, l’approche la plus enseignée est l’approche psychanalytique. L’APSU a encore du travail pour que les étudiantes et étudiants en Psychologie aient le droit à une formation aux meilleurs outils, en accord avec le Code de déontologie des psychologues.

Cette méthodologie étant basée sur l’analyse des seules informations publiquement données par les universités, l’APSU aimerait renouveler ce travail sur d’autres formations avec une méthodologie plus poussée. Cela nous demanderait davantage de ressources, notamment en temps pour coter chaque université.

Aussi cette méthode a des limites importantes, notamment du fait du peu d’informations apportées par certaines universités. En cela, si vous constatez une erreur dans le fichier relayé dans l’article de Franck Ramus, ou si vous souhaitez contribuer dans l’esprit de l’association, n’hésitez pas à nous contacter à l’adresse apsu@psychologiescientifique.org.

Psychologie à l’université :
témoignages sur un « Hold-up »

Imaginez que vous soyez un étudiant inscrit en première année de licence de physique à l’université, et que, dans les cours intitulés « astrophysique », on vous enseigne en fait l’astrologie. Pire encore, imaginez que les enseignants dispensant ces cours dissimulent aux étudiants le fait qu’il existe une manière plus scientifique de comprendre l’univers, ou dénigrent l’approche scientifique au prétexte qu’il s’agirait d’une « astrophysique américaine » ou que ce serait l’approche de la physique qui a permis de fabriquer les bombes atomiques. Vous trouvez ce scénario improbable ? Et pourtant, un scénario similaire se joue dans presque toutes les facultés de psychologie françaises (1).

C’est en ces termes que s’ouvre le nouveau documentaire de la réalisatrice Sophie Robert, « Hold-up sur la psychologie », qu’elle a choisi de diffuser librement sur internet, et que nous vous encourageons à visionner.

Si les étudiants en physique étaient formés de la sorte, cela aurait de toute évidence un impact sur la recherche française en physique, qui serait discréditée et marginalisée sur la scène scientifique internationale. Mais l’impact serait peut-être limité au-delà (les ingénieurs étant en France formés dans d’autres établissements). En revanche, un défaut de formation des étudiants en psychologie a un impact sociétal immense.

En effet, la profession de psychologue est un maillon-clé de l’offre de soins en santé mentale. Si les psychologues sont à jour de l’état des connaissances internationales en psychologie et sont formés aux formes de psychothérapie et d’intervention qui ont les meilleures preuves d’efficacité, on peut s’attendre à ce qu’ils répondent bien à la demande d’aide de première intention pour les difficultés psychologiques bénignes (dépression passagère et anxiété de faible intensité), ainsi qu’à la demande de soins efficaces pour les troubles mentaux plus sérieux (dépression et troubles anxieux sévères, phobies, trouble obsessionnel compulsif, trouble bipolaire…). Dans le cas contraire, la population a des soucis à se faire.

Le fait est qu’en France, il y a des raisons de s’inquiéter de la qualité de l’offre de soins en santé mentale. L’un des indices est le fait que les Français sont parmi les plus gros consommateurs de psychotropes en Europe, notamment pour les hypnotiques, les anxiolytiques et les analgésiques opiacés. Il peut y avoir plusieurs raisons à cela, par exemple, les habitudes de prescription des médecins. Mais on ne peut s’empêcher de penser que si les psychologues français étaient parfaitement capables de proposer des psychothérapies efficaces aux personnes qui en ont besoin, ces dernières auraient moins besoin d’avoir recours à des psychotropes.

Il est donc légitime de se poser quelques questions : Quelles sont les pratiques les plus courantes des psychologues français ? Quelle est leur validité scientifique ? Et quelle est leur efficacité sur les troubles mentaux ? Et puisque les psychologues sont formés à l’université, qu’est-ce qui est donc enseigné dans les facultés de psychologie françaises ? Sophie Robert a recherché les réponses à ces questions en recueillant des témoignages auprès d’étudiants et d’anciens étudiants des facultés de psychologie françaises. Ce sont ces témoignages qui sont présentés dans le documentaire « Hold-up sur la psychologie ».

Le constat est accablant : dans la plupart des facultés de psychologie française, les formations de « psychologie clinique » et de « psychopathologie », c’est-à-dire les parcours qui forment les psychologues qui s’occupent des troubles mentaux, sont accaparées en majorité ou en totalité par des approches non scientifiques à l’efficacité non établie. Au premier rang figure, pour des raisons historiques propres à la France, la psychanalyse, mais celle-ci n’a pas le monopole des approches non scientifiques.

Les témoignages convergent sur un certain nombre de constats : enseignement dogmatique, « vérités » assénées sans jamais fournir de justification par des études scientifiques, dénigrement systématique des approches scientifiques, pressions sur les étudiants pour les contraindre à se plier à l’approche hégémonique, pressions sur les étudiants pour les inciter à se soumettre à une analyse (longue et coûteuse pour les étudiants, lucrative pour les prescripteurs), etc.

Ces témoignages ne surprendront personne qui soit familier avec la psychologie universitaire française, qu’ils soient étudiants, enseignants, ou chercheurs : tout le monde connait parfaitement la situation. Nous appelons d’ailleurs ci-dessous tous ceux qui ont connaissance de faits similaires à ajouter leur témoignage en commentaire de cet article. Les personnes que ce documentaire vise à informer sont toutes les autres, qui ne connaissent pas l’enseignement de la psychologie en France, et en premier lieu toutes celles qui seront amenées à consulter un jour un psychologue, et qui n’ont pas les éléments pour savoir à quel point la qualité de l’aide qu’elles vont recevoir dépend de l’approche dans laquelle leur psychologue a été formé.

Dans un prochain article, nous aborderons les facteurs de blocage et les moyens pour obtenir que la psychologie clinique scientifique soit plus systématiquement enseignée à l’université française.

Appel à témoignages

En complément du documentaire Hold-up sur la psychologie, nous invitons les étudiants, anciens étudiants, enseignants-chercheurs en psychologie, mais aussi les usagers, clients et patients des psychologues cliniciens, à ajouter leur propre témoignage en commentaire ci-dessous. Il n’est pas nécessaire de nommer des personnes, en revanche il serait utile de préciser de quelle université et de quelle formation spécifique vous parlez.


Annexe

Pour les personnes qui s’étonneraient que l’on puisse parler d’efficacité et d’évaluation des psychothérapies, ces dernières étant notoirement réputées inévaluables, nous recommandons la lecture de ce précédent article du même auteur.

Pour les personnes qui ne comprennent pas ce que l’on reproche à cette auguste « science de l’inconscient » qu’est la psychanalyse, voici quelques visionnages et lectures recommandées :

Vous pouvez retrouver les précédents documentaires de Sophie Robert :


Note

(1) Le phénomène concerne aussi des facultés de psychologie en Belgique et en Suisse francophones, ainsi qu’au Liban, comme nous le découvrons dans le documentaire. Il est également endémique en Argentine et au Brésil.

10 conseils pour distinguer la science de la pseudoscience

Revue électronique de Psychologie Sociale, 2010-2011, No. 5.

Note méthodologique

Les 10 commandements pour aider les étudiants à distinguer la science de la pseudoscience en psychologie

Scott O. Lilienfeld
Emory University – Atlanta, USA

« Professeur Schlockenmeister, je sais que nous avons beaucoup à apprendre sur la perception visuelle dans votre cours, mais ne va-t-on pas apprendre quelque chose sur les perceptions extrasensorielles ? Un de mes professeurs de Lycée nous disait qu’il existait bon nombre de preuves scientifiques. »

« Dr. Glopelstein, vous nous avez appris beaucoup de choses sur l’intelligence dans votre cours. Mais quand allez-vous discuter des recherches montrant que la musique de Mozart augmente le QI des nourrissons ? »

« M. Fleikenzugle, vous ne cessez de parler des écoles de psychothérapie, comme la psychanalyse, les thérapies comportementales, et la thérapie centrée sur le patient. Mais comment se fait-il que vous n’avez jamais dit un mot sur les thérapies à intégration sensorielle ? Ma mère, qui est thérapeute, me dit que c’est un remède miracle pour les troubles de l’attention. »

Pseudoscience et psychologie populaire

Si vous êtes enseignant en psychologie, ces questions doivent sans doute vous sembler familières. Il y a une bonne raison à cela : en psychologie, la plus grande partie du « bagage de connaissances » que nos élèves amènent en classe se résume généralement à de la pseudoscience. En outre, nos étudiants sont souvent fascinés par les prétendues connaissances scientifiques en marge des champs académiques : la perception extrasensorielle, la psychokinésie, le channelling, les expériences extracorporelles, la persuasion subliminale, l’astrologie, le biorythme, le « sérum de vérité », l’effet de la lune sur les comportements, la régression sous hypnose, les troubles de personnalité multiple, les rapports d’enlèvements extraterrestres, l’analyse graphologique, les thérapies de rebirthing (dites aussi « respiration conscience »), ou encore les traitements de la dépression à base de phytothérapie pour n’en nommer que quelquesuns. Bien entendu, dans la mesure où certains de ces exemples peuvent éventuellement contenir une once de vérité, nous ne devrions pas les rejeter en bloc. Néanmoins, une chose troublante concernant ces revendications est le décalage flagrant entre les nombreuses personnes adhérant à ces croyances et la maigreur des preuves scientifiques les appuyant.

Pourtant, de nombreux enseignants en psychologie n’accordent dans leurs cours qu’une attention minimale aux sujets potentiellement pseudo-scientifiques, cela sans doute parce qu’ils pensent que ces sujets sont d’un intérêt au mieux marginal pour les sciences psychologiques. En outre, bon nombre d’ouvrages d’introduction à la psychologie n’abordent qu’à peine ces sujets. Après tout, n’y a-t-il pas déjà suffisamment de choses à aborder en psychologie, alors pourquoi aborder des choses dont la valeur scientifique est douteuse ? De plus, certains enseignants craignent qu’en accordant de l’attention aux théories discutables, ils finissent par donner aux élèves un message involontairement biaisé qui donnerait une crédibilité scientifique à ces allégations.

Les avantages d’enseigner aux élèves à distinguer la science de la pseudoscience

Pourquoi devrions-nous apprendre aux étudiants en psychologie à distinguer la science de la pseudoscience ? George Kelly (1955), théoricien de la personnalité, écrivait qu’une assimilation efficace d’un concept implique une compréhension de l’ensemble de ses pôles. Pour exemple, nous ne pouvons pas saisir pleinement le concept de « froid » sans avoir expérimenté la chaleur. De la même manière, les étudiants ne peuvent pas saisir pleinement le concept de la pensée scientifique sans une compréhension des croyances pseudo-scientifiques, à savoir celles qui semblent, à première vue scientifiques, mais qui ne le sont pas.

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Revue électronique de Psychologie Sociale

« La RePS se veut une revue de vulgarisation scientifique de la psychologie sociale en langue française. Elle se donne pour objectifs de rendre les savoirs scientifiques compréhensibles et accessibles pour un large public sans pour autant renoncer à la rigueur scientifique. En effet, en plus d’une expertise par les pairs, la RePS cible à la fois un lectorat estudiantin  qu’il suive ou non un cursus de psychologie–, un lectorat de professionnels curieux, mais également le tout-venant intrigué par la psychologie sociale. La tâche n’est pas aisée, mais il aurait été dommageable qu’aucun ne se prête à l’exercice. » – RePS N°1

Je vous invite à découvrir la Revue électronique de Psychologie Sociale, dont le travail avait disparu à la suite de la fermeture de la revue après son dernier numéro datant de l’année 2014. Je remercie le Dr. David Vaidis pour ses informations et sa bienveillance, ainsi que tous les participants pour leur ouvrage, et vous souhaite une bonne lecture.

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Les psychothérapies sont-elles évaluables ?

Avez-vous déjà entendu l’affirmation « La psychanalyse n’est pas évaluable » ?

C’est en réaction que nous nous penchons ici sur l’évaluation des psychothérapies, en prenant pour exemple les psychanalyses, mais sans que nos explications se restreignent à celles-ci.

En préalable, qu’est-ce que « la psychanalyse » ? Sans chercher à la définir de manière générale, je précise que l’article suivant ne concerne pas la pratique dialectique s’adressant à des politiciens, des stars du show-biz, et à tout autre adulte en relative bonne santé disposant de temps et d’argent, et consistant à les écouter parler de leur mal-être et de leurs interrogations existentielles et à en donner des interprétations. Je n’ai d’ailleurs pas connaissance que qui que ce soit cherche à évaluer ce genre de pratiques, et de fait cela n’a pas grande importance. Cet article parle de la psychanalyse comme forme de psychothérapie, ayant pour ambition de soigner des personnes (enfants ou adultes) ayant de véritables troubles mentaux ou cognitifs (au sens le plus large du terme), et opérant donc dans le champ de la psychiatrie et de la psychologie clinique. Lorsqu’une pratique affiche (même implicitement) l’ambition de soigner des troubles, on conçoit mieux qu’il soit légitime de soulever la question de son évaluation.

Notons pour commencer que le discours selon lequel la psychanalyse n’est pas évaluable est en conflit direct avec le discours (parfois issu des mêmes personnes) selon lequel la psychanalyse marche. Si l’on peut affirmer que la psychanalyse marche, c’est bien qu’elle a été évaluée, et que le résultat de l’évaluation est positif. Elle est donc évaluable. Simplement, c’est le mode d’évaluation qui est débattu.

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Initiatives de membres

Nous vous présenterons ici des initiatives personnelles de membres sur lesquelles l’APSU ne se prononce pas mais dont nous ne doutons pas que vous pourriez trouver intéressantes.

Le singe qui baille héberge une série de vidéos illustrées qui reprennent le cursus de la licence de psychologie, comme d’autres émissions de vulgarisation plus loufoques. Guillaume, son créateur, est actuellement étudiant en licence de psychologie à Strasbourg.
Édit : Guillaume est désormais en master d’ingénierie psychosociale et la chaîne se renomme Cas Social.

Matériel pédagogique et autodéfense intellectuelle

Le CORTECS (Collectif de recherche transdisciplinaire esprit critique & sciences) est né en 2010 dans un triangle entre Grenoble, Marseille et Montpellier. Il a pour objectif central la transmission des divers aspects de l’esprit critique, la pensée critique ou sceptique (critical or skeptical thinking chez les anglophones), qu’on la nomme zététique, à la suite d’Henri Broch, hygiène préventive du jugement comme Jean Rostand, ou autodéfense intellectuelle à l’instar de Noam Chomsky. Conjointement, le collectif vise la mise en réseau de toutes les personnes étudiant ou travaillant sur un sujet relatif à l’élaboration, à l’usage ou à la diffusion de la pensée critique, quelle que soit leur origine disciplinaire et leur statut professionnel.

À l’Université Grenoble Alpes, Richard Monvoisin, Docteur en didactique des sciences et membre du CORTECS, anime le cours d’autodéfense intellectuelle :

Après 12 années de rodage, mes cours de zététique ont atteint un certain pallier. Aussi, avant de tout déconstruire, je souhaitais en garder trace, et c’est chose faite, grâce à l’équipe de choc du service audiovisuel de l’Université Grenoble-Alpes. Je me retrouve donc sur la playlist de l’Université Grenoble-Alpes, qui est sur… Youtube. Cocasse, non ? surtout après des entrevues comme celle avec Thomas VO Pour les facebookiens, youtubers, twittors et gmaileux. J’espère que dans les années à venir, la plate-forme libre framatube ouvrira ses portes. Je crée cet article pour mettre quelques documents, et je tenterai de répondre à quelques commentaires reçus.

PDF des diaporamas, podcasts et quelques compléments aux vidéos.

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Dans l’autisme, tout ne marche pas

Dans Libération du 14/02/2012, dans le but de contester par anticipation la recommandation de bonnes pratiques de la Haute Autorité de Santé pour l’autisme, Bernard Golse affirmait: « Dans l’autisme, rien n’est validé, tout marche si on met le paquet, c’est l’intensité de la prise en charge qui compte ». Les trois termes de cette affirmation sont faux. Reprenons-les un par un.

« Dans l’autisme, rien n’est validé »

Il est faux que dans l’autisme rien ne soit validé, il y a eu de nombreux essais cliniques qui ont évalué et comparé l’efficacité de différentes approches, et montré que certaines méthodes éducatives (notamment ABA, TEACCH, ESDM) avaient une efficacité supérieure aux soins courants.

La meilleure synthèse en a été faite par la Haute Autorité de Santé en 2012. On peut également consulter la bibliographie compilée par l’association Egalited, qui recense non seulement les études scientifiques, mais également les rapports de synthèse et les recommandations établies dans d’autres pays, qui convergent avec celles de la HAS.

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